Écologie et géopolitique en Corse
Marianne Lefevre*

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Le premier rapport de synthèse des contributions et des débats au sein de la commission des Affaires européennes de líAssemblée de Corse, créée le 26 mars 1999 et présidée par Jean-Guy Talamoni, responsable du groupe nationaliste Corsica Nazione, a été intégralement rendu public dans un opuscule hors série de líhebdomadaire indépendantiste U Ribumbu di a Corsica Nazione en juillet 2000. Sa préface, intitulée "Pour une Corse exemplaire dans une Europe des régions, est réalisée par Alain Lipietz, responsable national des Verts, député européen et directeur de recherches au CNRS siégeant au Parlement de Strasbourg dans le groupe Verts-Alliance libre européenne, qui rassemble des écologistes et des élus des "peuples sans État de régions autonomes comme les Basques espagnols, les Flamands ou les Écossais.

Le titre de cet ouvrage, Une ambition européenne pour la Corse, et son sous-titre, "Environnement et identité au cúur du développement, témoignent de choix politiques régionaux incluant une dimension écologique similaire à celle que revêt le plan de développement régional de 1993. Pourtant, dans cette île au patrimoine naturel exceptionnel, où très tôt se sont mises en place dans les années soixante-dix, sous líimpulsion du clan radical de gauche, des structures comme le parc naturel régional de la Corse ou un Conseil des rivages, antenne du Conservatoire du littoral, le mouvement écologiste I Verdi Corsi, rattaché au courant nationaliste et aux Verts nationaux, níont obtenu que 1,2% des suffrages aux élections territoriales de 1998. Les partis politiques insulaires seraient-ils tous déjà écologistes

Le fait que ce document soit préfacé par un responsable national des Verts et publié par le journal díun mouvement politique nationaliste régional témoigne-t-il de liens privilégiés entre líAssemblée de Corse et les Verts, díune part, ou entre indépendantistes corses et Verts à échelle locale, nationale et européenne, díautre part

Si les Verts nationaux qui condamnent régulièrement la violence en Corse sont cependant à chaque élection européenne des alliés au sein de coalitions électorales de formations politiques nationalistes parfois dotées díun mouvement clandestin politico-militaire, cíest la majorité régionale de la droite claniste et néo-claniste, présidée par José Rossi, de Démocratie libérale, qui, par un vote groupé, a porté à la présidence de cette Commission des affaires européennes Talamoni, le responsable de la Cuncolta Independentista, tête de file de Corsica Nazione.

La volonté commune à ces trois courants politiques de mettre en place une Europe des régions, fédéraliste et supranationale, explique-t-elle à elle seule cette politique consensuelle de repositionnement de líîle dans líespace national et européen Comment la promotion díune réforme institutionnelle accordant des pouvoirs díadaptation législative à des élus locaux revendiquant majoritairement une "adaptation de la loi Littoral dans líîle peut-elle avoir líadhésion díélus écologistes soucieux de la faire appliquer En quoi líassociation écologie-nationalisme peut-elle permettre de résoudre la contradiction entre exigence écologique et développement économique
 
 

Les écologistes en Corse appartiennent majoritairement

à la mouvance nationaliste
 
 

Dans les années soixante-dix, vague écologiste et développement

des mouvements nationalistes

La prise de conscience quíil fallait défendre líenvironnement síest faite précocement et brutalement en Corse, indépendamment de toute idéologie, en avril 1960, lorsque le gouvernement Debré décide unilatéralement de créer un centre díexpérimentations nucléaires souterraines dans les mines désaffectées de líArgentella, au sud de Calvi le mouvement de protestation unanime, à la mesure de la nature et de líampleur du projet, est díautant plus rapide quíil est impulsé par le mouvement du 29 novembre 1959, composé majoritairement et à échelle régionale díhommes politiques de gauche, communistes et radicaux, qui a déjà organisé des grèves générales contre la menace de fermeture des lignes de chemin de fer de la Corse.

En 1973, un deuxième mouvement massif de défense du patrimoine naturel touche líopinion publique insulaire et les Corses de líextérieur en réaction à une pollution marine au nord du cap Corse. Le déversement des déchets de fabrication du bioxyde de titane par la multinationale italienne Montedison est nocif pour les fonds marins des comités anti-boues rouges fleurissent à Bastia et à Ajaccio une manifestation unitaire en février 1973, avec à sa tête élus, hommes politiques, autorités religieuses, dégénère et se termine par líarrestation du responsable fédéral du parti communiste, adjoint à la mairie de Bastia, et du porte-parole de líAction régionaliste corse. Cette mobilisation générale aboutit à la condamnation, en avril 1974, des responsables de la multinationale au procès de Livourne le plasticage du bateau de la Montedison, revendiqué par le FPCL, sera approuvé par líopinion publique insulaire.

Une prise de conscience du capital esthétique exceptionnel de la Corse se développe en période de développement touristique dans les années soixante et soixante-dix et se poursuit de nos jours. Si la "beauté écrasante de líîle est soulignée dans le rapport de líHudson Institute commandé par la DATAR en 1970, en 1995 la Direction générale des politiques régionales de la Commission européenne, dans un document sur líévolution prospective des régions de Méditerranée occidentale, évalue ainsi les points forts de la Corse: variété et beauté des paysages, richesse des écosystèmes, environnement préservé, richesse en eau, identité culturelle forte, fort potentiel touristique, côte peu urbanisée.

La dimension environnementale prend place en Corse dans la politique díaménagement du territoire de certains élus du clan radical, dès la décennie soixante-dix. Le "vieux clan" Giacobbi, originaire du Vénacais, dont líaire díinfluence est líintérieur de líîle, fait très tôt le choix de la conservation du milieu naturel et díun tourisme intégré. Le parc naturel régional de la Corse, créé en 1971, est líúuvre du sénateur Giacobbi, sur la base du rapport du Pr Molinier présenté le 7 février 1966 au conseil général sur "la protection et la sauvegarde des richesses naturelles de la Corse. Sa localisation préférentielle en zone de montagne témoigne de cette tutelle, surtout en Haute-Corse. Il est aujourdíhui présenté comme un modèle de "protection-développement" et de tourisme à échelle nationale et internationale. Le maire de Piana et conseiller général des Deux-Sevi, Nicolas Alfonsi, président depuis 1976 du Conseil des rivages corse, antenne du Conservatoire du littoral, a "fait ses preuves: acquisitions entre autres du désert des Agriates, de Scandola, devenue une réserve naturelle classée en 1983 au patrimoine mondial de líUnesco, du delta du Fango, des sites de Porto et de líOstriconi, de Palombaggia, de Capo di Muro, Campomoro-Senetosa, Roccapina, du golfe de Ventilegne et des falaises de Bonifacio, soit 14 000 hectares et 175 kilomètres de rivage (20% du linéaire côtier régional).

La défense de líenvironnement devient un tremplin pour les nationalistes. Dans les années soixante et soixante-dix, les régionalistes nationalistes de líAction régionaliste corse, puis de líUnione di u Populu Corsu (UPC), se déclarent attachés à "leur terre, au patrimoine naturel et culturel de la Corse ils síopposent publiquement au "tout-tourisme: refus du complexe de la Testa-Vintilegne de cent mille lits sur les communes de Figari et de Bonifacio (projet de plus de 1 milliard de francs prévu par la société Finenco, filiale de La Paternelle, et encouragé par la DATAR) et du complexe touristique de Pinia à côté de Ghisonaccia (vingt mille lits) puis, avec virulence, opposition au schéma díaménagement de 1971. Dénonçant le risque de "baléarisation de líîle, ils exploitent le fait que la population, attachée à son île et à son patrimoine foncier, se sent dépossédée de sa terre.

Leur rôle est actif durant líaffaire des boues rouges. Edmond Simeoni déclare sur le port de Macinaggio, le 3 février 1973 "Quand un pays est ainsi menacé dans ses intérêts vitaux, cíest une cause pour laquelle on peut aller en prison. Nous en faisons désormais un problème régional. Des slogans antifrançais apparaissent dans les manifestations contre un gouvernement qui níintervient pas au niveau international auprès des autorités italiennes. À cette occasion, les nationalistes prennent à nouveau conscience quíune défense de líenvironnement peut faire líunanimité dans líîle et mobiliser une grande partie de la population insulaire, à Bastia et à Ajaccio, contre líÉtat central; ces actions entraînent líadhésion de la jeunesse. Des comparaisons métaphoriques sont établies entre les idéaux nationalistes, qui se veulent purs et désintéressés, et la beauté des paysages et du patrimoine naturel de líîle. En décembre 1966, líéditorial du premier numéro du journal régionaliste ARRITI présente cette publication comme une "jeune poussée de la sève magique qui coule dans nos veines, comme un torrent dans nos belles montagnes.

Des nationalistes commencent à militer au sein díassociations écologistes. Un des responsables du Comité anti-boues rouges à Paris, Norbert Laredo, qui deviendra en 1988 le leader díI Verdi Corsi, milite au sein du GARDE (Groupement díAjaccio et de sa région pour la défense de líenvironnement); le collectif Energia Corsa est créé par les animateurs du Comité anti-Vazzio qui avait regroupé, dès 1979, une quarantaine díorganisations contre la centrale au fuel díAjaccio-Vazzio, contre le câble Ico et pour onze barrages et la mise en valeur de líensemble de líénergie renouvelable insulaire. EDF est combattue en tant quíinstrument de domination du pouvoir central, soucieuse de ses seuls intérêts.

Líassociation de sauvegarde de líenvironnement U Levante, créée en 1986 dans le Cortenais pour la "protection des sites, en particulier celui de la vallée de la Restonica, présidée par Michelle Salotti, enseignante de biologie à líuniversité de Corse, accuse certaines associations díêtre des émanations directes ou indirectes soit de líÉtat, comme líAgence française pour la maîtrise de líénergie, soit des élus locaux, à travers lí"hégémonisme du parc naturel régional pour tout ce qui concerne la nature. Si cette association de sauvegarde de líenvironnement cortenaise très active et motivée se déclare indépendante de tous les pouvoirs et rassemble des personnes de sensibilités différentes, sa présidente se présentera en 1989 en tant que membre díI Verdi Corsi sur la liste des écologistes díAntoine Waechter aux élections européennes, et en 1992 sur la liste de Corsica Nazione

Des actions illicites des formations politico-militaires nationalistes participent à cette politique "écologiste de défense de líenvironnement insulaire. Les clandestins revendiquent des attentats pour "sauvegarder le littoral et lutter contre la spéculation immobilière et la "spoliation de la terre corse. Les plasticages freinent cette exploitation touristique spéculative et représentent dans un premier temps, pour la mouvance nationaliste, un contre-pouvoir à la volonté de mainmise économique sur líîle venue de líextérieur. Sur le continent, certains intellectuels vont jusquíà justifier líaction violente des clandestins au nom de la protection environnementale, tout en occultant díautres réalités de la décennie quatre-vingt ces plasticages et parfois ces meurtres ont lieu au bénéfice díintérêts particuliers à base de racket et de rachat à bas prix de biens fonciers dans un processus de mafiosisation. Líîle de Cavallo appartient toujours à des propriétaires díintérêts financiers non insulaires, moyennant le paiement díun "impôt révolutionnaire" à une organisation politico-militaire clandestine, comme le reconnaît Pierre Poggioli dans son journal de bord díun nationaliste corse.
 
 

Fin des années quatre-vingt les "écolo-régionalistes de líUPC

Les Verts sont la "force porteuse dont nous avons besoin, déclare Max Simeoni, leader de líUPC. Cette organisation, qui recrute majoritairement ses militants dans la bourgeoisie urbaine bastiaise et ajaccienne et dans la microrégion rurale du Fiumorbo, est en position de recul électoral depuis 1984, et a perdu de nombreux militants depuis 1976, date de création du FLNC. Elle compte se régénérer grâce à un combat écologiste susceptible de mobiliser la population. Identité ethnique et environnement sont associés dans le programme des Verts régionalistes.

Pour les élections européennes de 1989, les nationalistes síallient avec les Verts autour de la défense de líenvironnement "Le combat pour la terre est líâme du combat pour la Corse [...]. Líexemple de la mise en valeur de la côte orientale, qui a abouti au drame díAléria, impose de réfléchir aux conséquences díune spoliation organisée et généralisée (Kyrn, 8 décembre 1989). Ils occupent spectaculairement le domaine de Sperone, voulant faire un rappel symbolique de líaction díoccupation de la cave díAléria Sperone, où se pratique un tourisme de luxe parfaitement intégré dans le paysage, tandis que le journal de líUPC dénonce la spéculation immobilière dans líextrême Sud et les "latifundia du tourisme.

À líoccasion des élections présidentielles, des contacts sont établis en 1988 entre les responsables de líUPC et les Verts díAntoine Waechter. La Cuncolta et líUPC "se sont donné comme objectif de nouer des contacts avec les représentants de luttes nationalistes en Europe. LíUPC accorde au candidat écologiste divers parrainages díélus nationalistes, parrainages nécessaires à sa candidature, se jugeant "positionnée favorablement par rapport à tous les mouvements nationalistes, autonomistes ou régionalistes au sein de líÉtat français et pouvant ainsi ramener tout le monde, les Bretons (trois mouvements), les Occitans (deux mouvements), les Basques (trois mouvements), les Alsaciens, les catalans, les Flamands, etc., derrière la liste écologique. Ce positionnement provenait díannées de travail politique, notamment au sein de líAlliance libre européenne, et résultait donc directement de líaction de líUPC. Cette candidature "díouverture devient celle du nationalisme corse dans son ensemble autour de deux revendications fondamentales: la reconnaissance constitutionnelle du peuple corse et líautonomie interne. Antoine Waechter, "écolo-régionaliste crédité par les sondages de 2% à 2,5% díintentions de vote, présente à Ajaccio, aux présidentielles de 1988, un programme en cinq points lutte contre la fraude électorale, politique énergétique visant à líautosuffisance, enseignement du corse obligatoire de la maternelle à líuniversité, lutte contre le saupoudrage économique qui conforte les clans dans leur mainmise sur le destin de líîle et mise en úuvre díun plan de développement autour de trois axes principaux agriculture, énergie et tourisme. Les nationalistes corses gagnent une nouvelle tribune régionale, mais aussi nationale et internationale.

Max Simeoni fait alors partie de la "bande des quatre, conseil associant quatre élus insulaires de diverses sensibilités en liaison officieuse, secrète et continue avec le ministère de líIntérieur durant toute la phase díélaboration du statut Joxe líUDF José Rossi, le socialiste Laurent Croce, le RPR Henri Antona et le nationaliste Max Simeoni le gouvernement joue la carte díune "troisième voie moderne, díorigine politique diversifiée, contre les clans traditionnels unis dans un front de refus du statut Joxe.

Max Simeoni, aux élections européennes de 1989, se présente en troisième position sur la liste des Verts díAntoine Waechter. Selon le leader de líUPC, "les Verts sont à la recherche díun nouveau modèle de développement. Ils représentent une force progressiste, une force porteuse dont nous avons besoin. Notre accord est fondamental. Devenu député européen, il siège au groupe Arc-en-ciel au Parlement de Strasbourg pour une représentation régionaliste. "Il y a une dimension écologique dans le combat que mène le peuple corse, déclare François Alfonsi, responsable du parti autonomiste. En 1991, une action commune est menée par líUPC et le Partito Sardo indépendant pour revendiquer líarrêt du passage des pétroliers dans le détroit de Bonifacio cette alliance interrégionale et transfrontalière se concrétise avec líenvoi díune délégation à Rome.

En 1994, níétant pas retenu sur la liste des Verts en position éligible à líélection européenne, Max Simeoni fonde la fédération "Régions et peuples solidaires" et constitue une liste comprenant des Corses, des Occitans, des Bretons et des Basques, qui ne conserve quíune échelle locale. À líéchelle régionale, I Verdi Corsi apparaissent vers 1988, année de la campagne présidentielle Norbert Laredo prône líunion des autonomistes et des indépendantistes.
 
 

Durant la décennie quatre-vingt-dix une alliance de fait síétablit

entre nationalistes autonomistes et indépendantistes

Une politique díunion des autonomistes et des indépendantistes síest mise en place depuis 1985, sur le terrain électoral, aux législatives et aux régionales de 1986. Norbert Laredo et Michelle Salotti, díI Verdi Corsi, occupent respectivement la vingtième et la cinquante et unième position sur la liste des Verts aux européennes de 1989.

Ces nationalistes indépendantistes craignent pour 1993 un nivellement par le bas des acquis sociaux, un poids grandissant des multinationales dictant leurs conditions aux États de la CEE, et sont inquiets quant à líavenir des "petits peuples et des "petites nations ils dénoncent le danger díun espace judiciaire et policier européen et líimpossibilité díassumer au plan international des options de neutralité réelle du fait de la supranationalité et des choix idéologiques de Bruxelles (Kyrn, 19 août 1988). Par ailleurs, les attachés parlementaires de Max Simeoni ne sont autres que Jean-Guy Talamoni, de la Cuncolta, et François Santoni, dirigeant du FLNC en Corse-du-Sud, qui déclare dans un récent ouvrage que des dirigeants díI Verdi Corsi sont au FLNC "La réponse des Verts est acquise [pour la formation de la coalition de Corsica Nazione]. Leurs cadres sont en effet des militants du Front et, pour certains, à des postes de direction (J.-M. Rossi-François Santoni, Pour solde de tout compte, Denoël, p. 50). Cette alliance au sein de Corsica Nazione traduit une radicalisation du mouvement écologiste.

I Verdi Corsi constituent une formation politique nationaliste satellite. Ils ne prennent que rarement líinitiative díune démarche, níagissent jamais seuls et sont toujours associés à díautres mouvements nationalistes ou à líintérieur díassociations. Membres de Corsica Nazione à partir de 1992, les leaders des Verts corses figurent toujours en bonne position aux élections sur les listes de cette coalition nationaliste composée entre autres de la Cuncolta Naziunalista et de líUPC. Cette alliance donne un label écologiste à cette formation, ainsi reconnue à líéchelle nationale et européenne par les Verts. Elle sera inconditionnelle de 1992 à 1998. I Verdi Corsi cautionnent ainsi la non-condamnation de la violence par leurs partenaires.

Aux élections territoriales de mars 1999, I Verdi Corsi font partie de la coalition Uniti, qui comprend des groupements nationalistes se proclamant démocratiques, comme Corsica Viva, dont des responsables ont depuis été arrêtés, présumés coupables des attentats réalisés en plein jour contre líURSSAF et la DDE à Ajaccio, qui ont fait sept blessés. Puis de la coalition Unita, réunissant neuf organisations nationalistes, dont Corsica Nazione, la Cuncolta Independentista, líANC et Corsica Viva, qui ont signé un accord en quinze points à Ajaccio le 4 octobre 1999, dans lequel elles ne rejettent pas le principe de la lutte armée. Aux élections municipales díAjaccio en septembre 2000, le candidat díI Verdi Corsi figure à nouveau sur une liste díunion nationaliste en quatrième position.

La seule fois quíils se sont présentés devant les électeurs sous le sigle I Verdi Corsi, indépendamment des autres courants nationalistes, aux élections territoriales de 1998, ils níont obtenu que 1,2% des voix.

I Verdi Corsi participent ou cautionnent de grandes campagnes médiatiques ou díexplosifs pour la défense de líenvironnement. Dans le discours, ils associent désormais les concepts díidentité et díenvironnement, reprenant ainsi à leur compte les principes généraux des Verts mais cette parole se territorialise lorsquíil síagit de revendications nationalistes, comme la reconnaissance juridique du peuple corse ou líenseignement obligatoire de la langue corse. Leur mode díexpression publique privilégie les petits communiqués événementiels. Norbert Laredo déplore en quelques lignes et régulièrement dans la presse locale, au début des années quatre-vingt-dix, líabsence de plan de développement global et de schéma díaménagement de líîle et une poussée de plus en plus pressante à la veille de 1992 de la part des grandes sociétés aux capitaux venus díhorizons divers. Il soulève le problème du classement du site de Roccapina et de líîle de Cavallo, de la spéculation, ou des élus locaux comme ceux de Bonifacio ou Porto-Vecchio. En fait, ce sont les associations de défense de líenvironnement animées par des nationalistes écologistes militants qui agissent sur le terrain. Comme pour líannulation par le préfet de région de la délibération du conseil municipal de Bonifacio relative à la révision du POS du secteur de Piantarella-Sperone pour non-application de la loi Littoral.

Les écologistes verts síattribuent ainsi une victoire sur les bords de líOstriconi, arrachés par un classement "à la convoitise des spéculateurs. Une sortie est organisée par I Verdi Corsi et les associations de protection de líenvironnement de líextrême Sud, sur la piste de Piantarella-Sperone et sur líîle de Cavallo à líoccasion de la Journée mondiale de la terre du 22 avril 1990. Selon les organisateurs, líîle de Cavallo présente en miniature les problèmes qui se posent à la Corse à la veille de 1993, comme le non-respect de la réglementation en matière díurbanisme et de loi Littoral ils relèvent le cas du port privé du P-DG de Pioneer France et dénoncent la fausse légalité de projet díaménagement díun port de plaisance en plein cúur de la réserve naturelle des îles Lavezzi ce dernier, avec ses deux cent trente anneaux, ne sera jamais plastiqué...

Nicolas Alfonsi, président du Conseil des rivages, síélève contre ces manifestations publiques et médiatisées: "On ne peut quíêtre surpris de constater quíen 1990 des mouvements écologistes ou nationalistes, qui soit dit en passant ont la condamnation ou líindulgence sélective, puissent donner líimpression quíils sont les premiers à síoccuper díenvironnement. Et jíai eu líoccasion de préciser en díautres temps que je níavais pas attendu líex-FLNC pour míoccuper díenvironnement. Si je ne donne pas cette information en 1990, on finirait par penser dans cinq ou dix ans que les terrains achetés par le conservatoire depuis maintenant quinze ans líauraient été après les premières manifestations des nationalistes en matière díenvironnement, cíest-à-dire seulement à partir de 1990 (Kyrn, 8 juin 1990).

Cette campagne de mobilisation des Verts nationalistes et des associations quíils animent síarticule sur deux grands thèmes porteurs le refus du passage des pétroliers dans le détroit des Bouches de Bonifaccio et la politique énergétique de la collectivité territoriale de Corse Norbert Laredo intervient au nom du collectif Energia Corsa "Le gazoduc, le fuel ou Ico, cíest la même chose. [...] Nous inscrivons notre action dans le fil de celle du Comité anti-Vazzio, qui síest battu pendant une dizaine díannées pour que soit élaboré un plan de développement énergétique basé sur les richesses de la Corse et notamment sur líhydro-électricité. [Il faut] faire de la Corse "líîle des énergies renouvelables" pour líEurope (Kyrn, 27 avril 1990).

Une action de protection environnementale est également menée en Balagne par le FLNC-canal historique, qui déclare par un courrier assorti de menaces envoyé aux maires et à des entrepreneurs du bâtiment que le littoral est "inconstructible díoù un conflit avec des responsables locaux du Muvimentu Per líAutodeterminazione, devenus des promoteurs et dont les lotissements sur le littoral balanin sont à leur tour plastiqués (MPA vitrine légale du FLNC-canal habituel). Le candidat de ce mouvement aux législatives de 1993 síinterroge: "Est-ce que dans ce pays seuls les assujettis à líimpôt révolutionnaire ont le droit de construire
 
 

Et souvent le silence

I Verdi Corsi se mobilisent rarement dans le discours et sur le terrain pour des problèmes écologiques à forts enjeux politiques, comme lors de la vente aux enchères de líétang de Biguglia, au sud de Bastia, díune étendue de 1500 hectares, pour la somme modique de 16,5 millions de francs, que convoite un industriel et promoteur immobilier italien ou lors de la vente aux enchères de lots de la caserne Montlaur, au cúur de la citadelle de Bonifacio, vente qui sera refusée par le préfet Érignac, díéventuels acquéreurs devant y investir des capitaux douteux. Ces nationalistes écologistes restent remarquablement silencieux sur le problème de la chasse, líorigine des incendies ou les risques díinondations 80% de la population insulaire vit dans des zones inondables (dossier de Corse Matin du 3 octobre 2000 intitulé "Une région à hauts risques) un tiers des communes de Corse, dont celles de Bastia et díAjaccio, sont concernées. Seulement une dizaine de plans de prévention des risques (PPR) pour toute la Corse sont allés au terme de la procédure.

Lors de la campagne électorale de Corsica Nazione à líoccasion des élections territoriales de 1992, les écologistes nationalistes ont cautionné la plus grande pollution par bombages, affiches et inscriptions souillant le patrimoine naturel et historique de líîle, y compris les arbres, rochers et murs des citadelles.

Le 11 mars 2000, une assemblée générale à Corte rassemble une "quarantaine de militants présents ou représentés (Corse Matin, 23 mars 2000). Un nouvel exécutif se met en place, comportant dix-sept membres. Aucune précision níest donnée sur un programme ou sur les actions engagées le mouvement affirme son "attachement à la loi Littoral et son "soutien à la motion adoptée le 10 mars dernier par vingt-deux élus de líAssemblée de Corse, motion qui reconnaît líexistence du peuple corse, communauté de destins, et revendique un pouvoir législatif corse.
 
 

Contre líÉtat-nation républicain français et pour líEurope des régions
 
 

Des revendications identitaires et institutionnelles

à la remise en question díun aménagement à líéchelle nationale

Les revendications identitaires des écologistes nationalistes sont opposées au concept de nation française aux européennes de 1989, leur campagne porte sur la défense de líenvironnement avec le slogan "Pour la terre, pour la vie, pour le peuple. Toute la mouvance nationaliste, y compris les verts, revendique la reconnaissance juridique du peuple corse défini sur des bases ethnoculturelles, sur la terre, la langue, la culture. Dans une lettre adressée le 4 juillet 1991 au ministre des Affaires étrangères, Max Simeoni affirme que, "ethniquement, linguistiquement et culturellement parlant, la France est une véritable "Yougoslavie occidentale"". Demandant à Roland Dumas que la France reconnaisse les républiques souveraines de Slovénie et de Croatie et tire profit elle-même de líexemple yougoslave, il souligne quí"il y a là, díailleurs, matière à réflexion pour líÉtat français et ses gouvernants, qui continuent de nier líévidence, líexistence des peuples corse, breton, basque, occitan, catalan, alsacien, flamand et savoyard" (Corse Matin, 5 juillet 1991). LíUPC síallie avec le Partito Sardo díAzione, dont les principaux élus européens siègent au groupe Arc-en-ciel. Le mouvement autonomiste tend à européaniser le problème corse et se déclare très favorable à une confédération corso-sarde.

La pétition pour la reconnaissance juridique du peuple corse, "Corses díorigine et Corses díadoption, a été signée par Jean-Luc Bennahmias, secrétaire général des Verts. Quels sont les critères qui autorisent une définition des "Corses díorigine Corses "de souche Droit du sang Par cette alliance, les Verts cautionnent le nationalisme díexclusion de la Cuncolta et de Corsica Nazione, qui dans sa présentation sur Internet utilise toujours le terme díélectorat "allogène Cette notion de peuple et de nation est différente de celle de la France où la nation est une communauté de citoyens unis par des valeurs communes et universelles de liberté, díégalité, de fraternité.

En conséquence, les revendications institutionnelles des nationalistes reposent sur un critère de spécificité à líéchelle de líîle. Les nationalistes verts revendiquent au sein de Corsica Nazione líindépendance de la Corse le statut particulier de 1982 et celui de Joxe en 1991 sont insuffisants "Le projet Joxe ne correspond pas à ce que la Corse est en droit díattendre. En effet, le texte du projet se situe très en retrait au regard de la situation institutionnelle des grandes îles rattachées à des États membres de la CEE (Kyrn, 30 novembre 1990). Pour Norbert Laredo, qui se présente aux élections législatives de 1993 sur la liste de Corsica Nazione, dans une circonscription de Corse-du-Sud, "líécologie globale est étroitement liée à la notion díautodétermination. Elle est inséparable du développement autocentré qui est basé sur la mise en valeur prioritaire des ressources locales dans líintérêt de la population du pays considéré. Notre participation à Corsica Nazione est donc naturelle. Parallèlement, les Verts sont un mouvement qui dépasse les frontières. Le cadre institutionnel de la Corse doit comprendre des espaces de souveraineté conséquents en síinspirant des autres pays de líUnion.

Tous les organismes de décision doivent être régionaux une des cibles privilégiées des écologistes nationalistes est líentreprise nationale de service public EDF les membres díEnergia déclarent: "La mise en valeur des richesses énergétiques locales doit être la priorité absolue dans une perspective de développement global et de réduction de la dépendance économique. EDF, dans leur représentation, est un symbole du pouvoir de líÉtat, díoù une lutte virulente contre la centrale thermique au fuel du Vazzio au début de la décennie quatre-vingt (un rotor destiné à la centrale est jeté dans le port díAjaccio avec son camion par un commando masqué). Inversement, lorsque líAssemblée de Corse décide díimplanter une centrale thermique au gaz dans le Fiumorbo, il est vrai moins polluante, à 90 kilomètres de líagglomération bastiaise, centre de consommation principal, I Verdi Corsi restent silencieux, occultant toutes les règles rationnelles díaménagement du territoire. Ce vote, qui a eu lieu alors que les élus avouent être mal informés, est le résultat díune alliance dont la logique repose sur líorigine microrégionale des élus de la majorité régionale, de la droite corsiste et des nationalistes.

Durant la décennie quatre-vingt-dix, les prises de position politiques des écologistes nationalistes sur le processus de construction européenne mettent en exergue un concept de spécificité de la Corse au sein de líUnion européenne; Corsica Nazione et donc I Verdi Corsi appellent de concert à líabstention au référendum portant sur la ratification du traité de Maastricht, estimant que ce vote est franco-français, le particularisme corse níétant pas pris en compte comme celui des Açores ou de Madère. Ils revendiquent la reconnaissance díune spécificité insulaire corse garante de mesures dérogatoires au droit européen. Leur proposition commune aux autres forces politiques locales díune mise en place díun POSEI (programme díoptions spécifiques à líéloignement et à líinsularité) est refusée par la Commission européenne, pour qui la Corse est la plus "pauvre" des régions françaises mais la plus "riche" des îles de Méditerranée. Cette volonté de se dissocier du continent à partir de critères de spécificité et díidentité transparaît aujourdíhui dans toutes ses dimensions avec le projet de mise en place díun parc national marin au nord-ouest de líîle, entre Calvi et Piana.

La création díun parc national marin, structure généralement appréciée de tous les écologistes, suscite une opposition virulente de la part des élus nationalistes de Corsica Nazione "Voudrait-on, en créant cette enclave de 125 kilomètres sur notre côte occidentale, nous spolier de nos plus beaux fleurons de notre patrimoine national [Ces sites remarquables,] héritage de nos ancêtres, constituent, pour les Corses et les générations futures, une richesse écologique inestimable et inaliénable. Ils sont notre propriété (Corse Matin, 6 avril 2000). En conséquence, des moyens supplémentaires doivent être alloués au parc naturel régional. À líorigine du projet, en 1994, il y a unanimité des élus communaux, départementaux et régionaux pour la création díune telle structure, avec la promesse informelle de líÉtat díune représentation majoritaire des élus locaux au sein du conseil díadministration et díune intégration du parc régional au sein du parc national líenquête publique révèle au printemps 2000, en plein processus de Matignon, une opposition de la majorité des communes, excepté celle de Piana, de Nicolas Alfonsi et du maire díOsani. Selon une enquête de LíExpress, les militants nationalistes "ont fait le tour des registres díutilité publique ouverts dans les communes. Celui díOsani a ainsi enregistré 280 oppositions, alors quíil níy a que 91 habitants permanents. À Calvi, sur plus de 500 signatures, une seule est favorable au parc national. La gestion du parc national et celle du parc régional devant être dissociées, les responsables du parc naturel régional, qui ont pourtant parrainé ce projet, síy opposent à leur tour, déclarant que "les parcs nationaux ne favorisent pas le développement le nouveau président du PNRC accuse "LíÉtat dit vouloir améliorer le projet, nous on en veut plus Le ministère de líEnvironnement prévoyait un budget de 20 millions de francs pour son parc quíil nous en donne 10 et on fera un meilleur boulot que lui (LíExpress, 20 juillet 2000). Les communes favorables à la création du parc national marin, constituant la majeure partie du linéaire côtier de Capo Rosso à Galéria, ont quitté le parc naturel régional, désormais dépourvu de façade maritime.

Les responsables locaux de líenvironnement font ainsi le choix de confier à une gestion écologique régionale le plus grand parc marin prévu en Méditerranée, soit un aménagement environnemental díintérêt national, voire mondial les rivalités de pouvoir sur fond de développement díactivités touristiques et de clientélisme local seront-elles occultées dans ce parti pris politique díaménagement du territoire
 
 

Nationalistes et Verts misent sur deux nouveaux niveaux de pouvoir

la région et líEurope

Les écologistes corses jouent Bruxelles contre Paris dès le temps des écologistes de líUPC, un discours ni droite-ni gauche est commun à Antoine Waechter et à Max Simeoni. "Tout díabord, le problème sera de trouver des convergences avec díautres forces, díautres situations identiques. Et il y en a beaucoup. Il y a deux axes, líaxe des îles et líaxe des peuples. Les régions et les peuples sans État níont pas encore réussi à se regrouper. Cíest pour moi une action capitale, explique Max Simeoni dans Kyrn du 3 février 1989. Les membres de son mouvement prônent une politique écologiste et économique dans le cadre díune Europe des régions, au sein de líAlliance libre européenne, dans laquelle il siège de 1989 à 1994.

Pour ce leader nationaliste, les Verts ont la volonté díintégrer les thèmes identitaires "LíEurope des peuples et des régions naturelles [sic] est une réalité pour eux. LíEurope des solidarités quíils proposent est la seule viable. Solidarité qui se traduit par les FEDER à partir de 1975, et les Programmes intégrés méditerranéens cet intérêt envers líEurope se renforce à partir du moment où des fonds structurels européens sont attribués à la région Corse, les membres de la Commission européenne ayant fait de la région le lieu privilégié de líintervention financière. Or la collectivité de Corse est la région qui a reçu les financements structurels européens par habitant les plus élevés de France, bénéficiant jusquíen 1999 de líobjectif n° 1 au même titre que les îles italiennes ou la totalité du territoire grec.

Regroupés au sein de Corsica Nazione à partir de 1992, les nationalistes occultent líespace étatique national, se définissant toujours dans un contexte méditerranéen, européen et mondial en pleine évolution. La représentation de líEurope des indépendantistes síest modifiée dans la décennie quatre-vingt-dix tout díabord méfiants à líégard de lí"Europe des marchands, contre le marché unique européen et la libre circulation des capitaux ils défendent líinstauration díun "code des investissements devant permettre aux zones marginales de garder la maîtrise du foncier. En revanche, dans La Corse du 10 juin 1999, Norbert Laredo affirme, à la veille des élections européennes, sa volonté de construire une Europe des peuples et des régions solidaires, demandant une solution politique adaptée pour líîle, en dehors du face-à-face stérile avec Paris "La situation des îles doit naturellement être appréhendée de manière spécifique. Concernant la Corse et les DOM-TOM, les Verts proposent que soit favorisé un cadre institutionnel comprenant des espaces de souveraineté conséquents en síinspirant des autres pays de líUnion (Catalogne et Baléares en Espagne, Länder allemands, Écosse...) et cela en conformité avec les désirs spécifiques des différents peuples concernés... Il est à noter quíils ne prennent jamais comme exemple le Pays basque espagnol, qui allie violence et autonomie dans le contexte díun gouvernement local nationaliste.

En conséquence, les nationalistes et les verts revendiquent pour la collectivité territoriale de Corse un pouvoir législatif qui alignerait son statut sur celui des grandes îles voisines de Méditerranée occidentale. Dans le projet de "Coopération pour líaménagement du territoire européen" de la Commission européenne de 1994, la Corse est intégrée avec les Baléares et la Sardaigne dans le modèle des îles de lí"Arc latin", et ainsi dissociée de la "façade maritime française" formée des régions PACA et Languedoc-Roussillon. La structure Imédoc ó Îles de Méditerranée occidentale ó est créée en 1995 à partir de ce regroupement de la Corse, de la Sardaigne et des Baléares; cette entité territoriale plus conséquente veut "síinventer un destin commun. En líabsence díun projet commun, le "lobby des îles de Méditerranée occidentale, auquel vient díadhérer en avril 2000 la Sicile, forme un ensemble territorial de près de 8 millions díinsulaires.

La volonté des instances de Bruxelles de favoriser líémergence de grands ensembles régionaux à échelle européenne coïncide avec la mobilisation croissante des dirigeants des îles de Méditerranée occidentale pour un statut particulier insulaire au sein de líUE. La Commission européenne joue désormais un rôle díarbitre en matière fiscale et dans le domaine des transports maritimes et aériens. Les demandes du député européen sicilien Viola en matière de financement, de taux díintervention, de fiscalité ou de transport deviennent en mai 1998 une résolution du Parlement européen relative aux régions insulaires. Parlement européen qui se déclare ouvertement favorable à une Europe des régions les élus nationalistes souhaitent que les prérogatives des îles soient étendues par rapport à líÉtat central. Leur représentant, président de la commission des affaires européennes de Corse, défend à ce titre, lors de la présidence française du Conseil européen dont il espère "profiter, un statut dérogatoire au droit européen pour la Corse reprenant les orientations du rapport Viola.

La mise en place du parc international marin de Bonifacio à líéchelle interrégionale et transfrontalière, menée au plan international dans le cadre du programme européen Interreg, est ainsi approuvée sans réserve par les écologistes nationalistes. En sont membres líItalie et la France, mais aussi la Sardaigne et la Corse. Le projet a été supervisé en Corse par une structure du pouvoir régional, líOffice de líenvironnement.

Écologistes et nationalistes régionaux siègent dans les mêmes formations à líAssemblée de Corse et au Parlement européen. Les Verts et les nationalistes corses partagent une vision fédéraliste des futures institutions européennes. Pour Norbert Laredo, "la présence díun groupe vert au Parlement européen peut déboucher sur une véritable alternative pour la Corse. Líîle se trouve aujourdíhui dans une situation díimpasse et de face-à-face stérile et lourd de tensions avec líÉtat. Efforçons-nous de construire un avenir de paix et de dignité (Corse Matin, 12 mai 1999). La campagne díAlain Lipietz, numéro trois de la liste des Verts, est placée à Ajaccio le 17 mai 1999 sous le signe de la "révolution démocratique européenne, alliant la défense de líenvironnement à une conception fédérale de la gestion politique et à un concept de justice sociale au plan européen (Corse Matin, 14 mai 1999). La Charte des langues minoritaires doit être ratifiée par tous les États membres de líUnion. I Verdi Corsi proposent díadopter "une Constitution fédérale européenne avec création díun sénat représentant les régions et les peuples díEurope dans toute leur diversité.

I Verdi Corsi avec Uniti et líUPC se rendent de concert au conseil national interrégional des Verts à Lorient, où ils posent "le problème corse au plan européen. Cette démarche est ainsi justifiée par le leader des verts corses: "Dans le paysage politique français, les Verts sont actuellement la seule formation politique auprès de laquelle nous pouvons trouver un écho. Il suffit de se référer à leur programme pour les élections européennes. Mais aussi à leur philosophie, qui, depuis des années, leur fait considérer le problème corse sous líangle díune Europe des régions. La motion des écologistes corses, adoptée à líunanimité par le conseil national interrégional, demande au collège exécutif de "mettre en place une méthodologie et un calendrier permettant de déboucher dans les meilleurs délais sur des positions concrètes propres à construire une solution politique véritable pour le problème corse... (Corse Matin, 16 septembre 1999). Cíest pourquoi I Verdi Corsi et líUPC soutiennent aux élections européennes de juin 1999 la liste des Verts de Daniel Cohn-Bendit, où sont présents deux membres díI Verdi.

Dans le numéro du Ribumbu de juillet 2000, Alain Lipietz intitule sans ambiguïté sa préface "Pour une Corse exemplaire dans une Europe des régions. Attribuant à sa qualité de "spécialiste des conditions díun développement régional réussi le fait de préfacer le premier rapport de la commission des Affaires européennes de líAssemblée de Corse, il relève quí"en síaffirmant ainsi comme région au sein díun ensemble, líEurope, la Corse se fraie une voie qui non seulement la met de plain-pied avec le siècle qui síouvre, mais peut-être aussi lui permettra de sortir "par en haut" des impasses des deux siècles écoulés (sic). "Identité et excellence écologique sont les deux réponses que peut offrir la Corse à cet espace díappartenances multiples quíest líEurope. Une Corse partant avec un avantage significatif dans la course au développement soutenable, à líexcellence écologique. Le député européen vert conclut ainsi "La Corse níaffirmera sa place de joyau européen de la Méditerranée que si le peuple corse lui-même síempare de la question de son propre destin, du développement de son propre territoire.

Les divisions des Verts au niveau national se reproduisent au niveau local aux européennes de 1999, le courant écologiste díAntoine Waechter présente dans sa liste des nationalistes "durs de la Cuncolta Independentista, vitrine légale du FLNC-canal historique.

I Verdi Corsi et les nationalistes, en jouant cette carte écologiste, se différencient des partis traditionnels: ils forment un parti européen, renforcé par les élus verts régionalistes et fédéralistes. Norbert Laredo, lors des élections européennes de 1999, déclare quí"il y a líopportunité de situer notre groupe au troisième rang européen (La Corse, 12 mai 1999). Reconnus ainsi par des formations politiques qui ont une légitimité européenne, ils ne sont plus isolés en tant que nationalistes sur líéchiquier politique français et régional où ils ne font pas partie de la gauche plurielle. LíUPC appartient à líAlliance libre européenne, coalition représentant les "peuples sans État, composée díélus basques, occitans et bretons et de líAlliance radicale européenne dont sont membres des partis nationalistes européens comme le Scottish National Party, líUnion démocratique bretonne et Unitat Catalana.
 
 

Accords avec les "rossistes de Démocratie libérale,

parti favorable à une Europe fédéraliste

Les Verts nationaux, comme Démocratie libérale, conservent leur alliance avec la mouvance nationaliste, quelle que soit la situation de violence en Corse.

Les membres de la commission se déclarent, dans le document de la commission des Affaires européennes de líAssemblée de Corse, favorables à une "économie écologique. Ils reprennent en cela les propositions du président de líuniversité de Corte, qui a líambition de faire de la Corse la "terre de référence mondiale de líéconomie écologique et identitaire si cette image de terre de référence est acquise dans líopinion internationale, en conséquence, "les secteurs économiques actuels de líîle, convenablement orientés, vont être propulsés par cette image mondiale, leur permettant de rentrer dans líéconomie-monde. Or, pour être une "terre de référence, il faut "remplir certaines conditions être une communauté à líidentité forte nous le sommes. Être un lieu esthétiquement exceptionnel nous le sommes. Être un lieu dont líenvironnement soit particulièrement préservé nous ne le sommes quíen partie seulement.

La deuxième composante du discours du président de líuniversité níest pas reprise par le texte de la Commission européenne "pour protéger nos côtes, cibles privilégiées díappétits divers, il faut donc "appliquer strictement la loi Littoral "protéger líensemble de líîle par un schéma díaménagement qui évite le "mitage" du territoire et favorise líurbanisation uniquement dans les centres existants. Et "réaliser un plan régional de lutte contre les pollutions, de traitement des déchets, de gestion de líeau, des espaces et des espèces, et de promotion des énergies renouvelables (Corse Matin, 27 mai 2000).

Cette ambition díun développement local reposant sur líenvironnement et líidentité doit être replacée dans un contexte de croissance des pouvoirs régionaux souhaitée à la fois par la droite libérale locale, les nationalistes, la gauche "girondine et les Verts díoù la revendication díun pouvoir législatif à échelle régionale. Dans la motion minoritaire des vingt-deux, des élus de líAssemblée de Corse regroupant ces trois courants demandent de plus larges compétences sur le fonctionnement du principe de subsidiarité et de "fixer le cadre díun nouveau statut de líîle donnant lieu aux transferts de blocs cohérents de compétences assortis de pouvoirs législatifs et réglementaires. La compétence proposée en exemple est celle concernant les domaines transférés du patrimoine et de líenvironnement, de la culture et de la langue, de líaménagement du territoire et du développement. Le principe de subsidiarité, contrairement à celui de la légitimité démocratique, est ici retenu, sur le modèle des pays fédéraux. Or le système relationnel vertical organisé autour de ce principe, les compétences síexerçant à la base, à líexception de celles qui sont retenues au niveau supérieur, véhicule un utilitarisme institutionnel et une forte référence aux appartenances sociologiques. Il est contraire au principe français de la décentralisation, qui instaure une répartition horizontale des compétences en fonction de la nature de líintérêt, national ou local, dont elles relèvent "Líadministration territoriale de la République est assurée par les collectivités territoriales et par les services déconcentrés de líÉtat."

Les partisans díAlain Madelin soutiennent officiellement le courant de la motion des vingt-deux "Jíai soutenu la démarche de José Rossi, je ne le regrette pas, avec líidée que cíétait un avant-goût, mais quíil ne fallait pas faire une démarche isolée pour la Corse, quíil fallait faire une politique de régionalisation pour líensemble des régions françaises (Grand Jury RTL/Le Monde/LCI, 10 décembre 2000). Tandis que la ministre de líEnvironnement et de líAménagement du territoire, Dominique Voynet, trouve que le mot "autonomie est "un des plus beaux mots de la langue française. Déclarant que "les Verts corses sont proches de la mouvance nationaliste et que ces liens sont "anciens, elle se dit favorable "à une simplification et surtout à une démocratisation de la vie locale et régionale (Le Nouvel Observateur, 23-30 août 2000).
 
 

Le paradoxe vert pour líapplication de la loi Littoral

et líinstauration díun pouvoir législatif régional en Corse
 
 

Difficulté des élus locaux à prendre en charge líaménagement de leur île

Il níy a pas de schéma díaménagement établi par le pouvoir régional. Ce sont les acteurs politiques insulaires qui doivent définir leur stratégie de développement dans un plan de développement et un schéma díaménagement, tous deux garants díun projet politique global pour la Corse. En effet, le statut particulier de 1982 et le statut Joxe díautonomie interne de 1991 ont accordé des pouvoirs accrus aux responsables régionaux le schéma díaménagement régional doit définir les orientations fondamentales en matière díaménagement de líespace, de protection et de mise en valeur du territoire insulaire ont été transférées à la région, dès 1982, les compétences en matière díurbanisme et díaménagement du territoire. Or ce schéma nía jamais été mis en place. Alors quíil est adopté par les élus régionaux le 14 décembre 1989, Pierre Joxe, en janvier 1990, dessaisit líAssemblée de Corse de ce document car il a été voté hors du délai fixé par la loi. Le Livre blanc préparatoire au nouveau schéma díaménagement, qui sera approuvé le 16 janvier 1992 par la seule administration, sans consultation publique faute pour la région díy avoir répondu dans les délais impartis, désavoue le texte et la cartographie réalisés par líexécutif de líAssemblée de Corse; il y est écrit que "pour lutter contre les dérives constatées, ce Livre blanc doit commencer par définir quelques principes simples, compatibles avec la loi Littoral, qui formeront la doctrine de base de líurbanisme littoral en Corse. Une urbanisation mieux hiérarchisée mettre en valeur le concept de station une urbanisation à partir de líexistant refuser le mitage et renoncer à la création díunités touristiques nouvelles une urbanisation en profondeur renouer avec les anciennes solidarités littoral-piémont. Síil convient dí"établir une typologie fine du littoral et dí"énoncer les règles adaptées à chaque type, líéchelle et la portée générale de ce document "imposent, pour le respect et líapplication de ces principes, líétablissement de documents díurbanisme locaux (Livre blanc préparatoire au schéma díaménagement de la Corse, décembre 1990).

Le schéma díaménagement de la Corse de 1992 est encore appliqué faute de nouvelle élaboration par les élus de líAssemblée régionale, qui ont pourtant bénéficié à nouveau de cette compétence avec le statut Joxe de 1991 il síimpose pour líélaboration des POS ou PLU et des cartes communales et commande líapplication de la loi Littoral, qui concerne quatre-vingt-dix-huit communes, soit plus de la moitié du territoire insulaire. Díautant quíil y a souvent absence de schémas directeurs et de POS dans les communes littorales, comme Porto-Vecchio, troisième agglomération de líîle située au cúur de líextrême Sud, principal pôle touristique de líîle. En effet, le nouveau schéma, préparé par le Conseil exécutif et adopté le 22 septembre 1997 par líAssemblée de Corse, a reçu un avis défavorable en décembre 1997 du Conseil des sites et du Conseil économique, social et culturel ce dernier affirme que ce projet de schéma "níest pas conforme au plan de développement et que líinterprétation extensive des lois quíil comporte présente un grave danger pour le littoral insulaire il souligne "ce quíil considère comme des carences dans le traitement des modalités díapplication des lois littoral et montagne (Corse Matin, 17 décembre 1997).

Transmis fin 1997 aux services régionaux de líÉtat, ce schéma reçoit également un avis défavorable du préfet Claude Érignac le 19 janvier 1998, les dispositions relatives à la partie du schéma díaménagement de la mer níétant pas conformes aux objectifs de la loi Littoral il est à noter que cíest à la demande de líAssemblée de Corse que la loi du 25 janvier 1985 a décidé que le schéma de mise en valeur de la mer, au lieu díêtre élaboré par líÉtat, suivant la règle générale, le serait par la Région et constituerait un chapitre spécial, compte tenu de son rattachement au domaine public maritime. Le futur statut en préparation dans le processus de Matignon prévoit désormais líélaboration par la collectivité territoriale de Corse díun "plan díaménagement et de développement durable de Corse par délibération particulière et motivée de líAssemblée de Corse, il peut fixer la liste des espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral et des milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques à préserver il vaut directive territoriale díaménagement et à ce titre peut préciser, pour les territoires concernés, les modalités díapplication des dispositions particulières relatives aux zones de montagne et du littoral, adaptées aux particularités géographiques locales il vaut, pour les secteurs quíil détermine, schéma de mise en valeur de la mer.

En conséquence, ce nouveau transfert de compétences en matière díaménagement du territoire aux pouvoirs régionaux, désormais sans contrôle de la puissance publique nationale déconcentrée, peut susciter une certaine perplexité quant à líefficacité des choix politiques en matière díenvironnement et de développement "soutenable. Par ailleurs, y aurait-il des critères différenciés de délimitation de "sites et paysages remarquables à líéchelle nationale et à líéchelle régionale
 
 

Problème de lí"adaptation" de la loi Littoral

et sa méconnaissance par les acteurs locaux, publics et privés

Une application stricte de la loi Littoral est la condition pour le président de líuniversité de Corte díune protection de "nos côtes pour la ministre de líEnvironnement et de líAménagement du territoire, "la loi Littoral est excellente pour la Corse comme pour le reste du littoral français (Le Monde, 23 mai 2000). Au mois de mai 1999, une campagne de presse remet en question líapplication de la loi Littoral à líéchelle régionale et nationale. Tandis que le journal La Corse titre une page entière "La Corse sous le carcan de la loi Littoral" ó "Sois belle et tais-toi. Cíest líinjonction de líÉtat à la Corse en líenserrant dans le corset de fer de la loi Littoral ó le 3 mai 1999, un article du Monde du 23 mai 2000 est intitulé "La loi Littoral devrait être "aménagée" en Corse. La plupart des élus insulaires "souhaiteraient une adaptation pour favoriser le développement touristique. Pour Camille de Rocca Serra, maire de la ville de Porto-Vecchio, par ailleurs dépourvue de POS, "la Corse souffre díun retard de développement cette loi ne doit pas être une loi de stérilisation des espaces.

Il y a consensus des acteurs locaux pour une méconnaissance de la loi Littoral. À aucun moment les élus favorables à une adaptation de cette loi ne viennent expliquer à líopinion publique insulaire, par voie de presse écrite ou télévisée, les contraintes díapplication díune telle loi. Elle est toujours condamnée dans sa globalité, jamais sur son contenu. La loi Montagne quant à elle est rarement mentionnée, les mêmes responsables politiques étant moins sensibles à ses contraintes, leur commune síétendant jusquíau littoral.

Selon Danielle Schirmann-Duclos, la loi Littoral énonce un certain nombre de principes généraux díaménagement du littoral, qui, en líabsence de définitions précises des concepts employés, ont été la source de multiples contentieux. Le concept de "hameaux nouveaux" intégrés à líenvironnement est ambigu. La direction régionale de líÉquipement de Corse a publié en 1996 un fascicule intitulé Le Hameau nouveau intégré à líenvironnement, qui décrit les particularités du hameau corse et la manière dont les programmes de lotissement devraient les prendre en compte le ministère de líÉquipement aurait été questionné à propos díun hameau de vingt-cinq mille lits en projet à Port-Vendres, dans les Pyrénées-Orientales (La France et la mer, PUF, 1999).

Líalliance des écologistes et de la droite libérale régionale est-elle durable Le courant de la droite libérale se positionnant clairement pour une exploitation économique du littoral, son alliance avec les écologistes níest-elle pas porteuse de contradictions à long terme

En Corse, líaffaire de "la paillote" est exemplaire dans cet enjeu de pouvoirs síexprimant à tous les niveaux ce type de construction très localisée cristallise les enjeux de pouvoir des forces politiques locales, clanistes ou nationalistes, et la vision politique de líÉtat. Sur une plage magnifique, milieu littoral fragile díun capital écologique exceptionnel, soit une portion du domaine public maritime, un acteur privé construit en toute illégalité une paillote díoù une atteinte au patrimoine naturel et à líenvironnement. Le littoral étant un espace limité très convoité, pour que cette construction soit édifiée et exploitée, il faut un accord du pouvoir claniste ou néo-claniste, des nationalistes et, jusquíen 1998, du représentant de líÉtat déconcentré, le préfet de région. La rupture de cette entente tacite par le préfet Bonnet eut des conséquences considérables un président de líAssemblée de la collectivité territoriale de Corse, José Rossi, accompagné díun autre ancien ministre de la République, François Léotard, se déplaçant de manière impromptue sur une plage pour défendre le propriétaire díune construction illégale, et le renversement díun préfet de la République accusé par des militaires díun corps díélite díavoir donné líordre díincendier cette paillote. La mise en valeur du littoral en Corse demeure une entreprise complexe.
 
 

Les organisations nationalistes sont partagées sur la défense du littoral en Corse

Des responsables politiques nationalistes sont devenus des investisseurs sur le littoral: ils ne se soucient plus de défense du patrimoine, de préservation ou de développement durable. Leurs rivalités pour la mise en valeur du littoral síinscrivent parfois dans un contexte plus large comprenant le "milieu" local, à antennes nationale et internationale, síopposant entre Haute-Corse et Corse-du-Sud. Il y a interpénétration des milieux nationalistes et des milieux díaffaires, pour la mise en valeur du littoral. Un pouvoir autonome de la collectivité de Corse sera-t-il en mesure de faire face à une telle clientèle

Le projet díAndré Guelfi, homme díaffaires qui prétend "avoir réussi à ouvrir le marché russe à la société ELF, prévoit un aménagement touristique global de la ville de Bonifacio en collaboration avec un ancien dirigeant du FLNC-canal historique il déclare dans la presse nationale et régionale vouloir aménager à Bonifacio un port pour yachts, un hôtel cinq étoiles, des pavillons "haut de gamme", des boutiques de luxe et un parking de trois mille cinq cents places "avec des investisseurs américains et brésiliens Ces déclarations publiques ont ému et inquiètent les associations de défense du littoral. Sur le terrain, les actions de défense de líenvironnement sont le fait díassociations et de divers collectifs désormais affaiblis et isolés, qui rassemblent des écologistes et des nationalistes Collectif contre les incendies, Collectif des associations de protection de líenvironnement et des pêcheurs, Collectif pour líapplication de la loi Littoral en Corse, Coordination des associations de protection de líenvironnement de líextrême Sud, Collectif régional díassociations pour la protection de la nature et de líenvironnement de la Corse il y a entrée de la société civile et disparition du projet politique.

I Verdi Corsi níapparaissent que par leur sigle pourquoi une telle passivité Leur communiqué sur les paillotes est un modèle díambiguïté: líexamen du dossier des paillotes doit síeffectuer "dans le respect des lois et réglementations relatives au littoral et au domaine public maritime. Líensemble des parties concernées doit síimpliquer de façon concertée: pouvoirs publics, élus, associations, scientifiques et exploitants. Un schéma díaménagement doit être élaboré pour chaque plage après que les services de líÉtat, dont cíest la compétence, ont délimité le DPM. Ce schéma de plage doit déterminer le seuil maximal díaménagements démontables que le site peut supporter. Un cahier des charges devra préciser les conditions díexploitation des établissements de plage aux niveaux fiscal, social et environnemental. Tout bétonnage devra donc être sanctionné. Pour I Verdi Corsi, il níest pas acceptable que notre littoral soit livré à une "paillotisation" débridée (Corse Matin, 26 septembre 1999).

Inversement, le Collectif pour líapplication de la loi Littoral en Corse joue un rôle actif pour la défense de líenvironnement dans líîle. Il est essentiellement composé díune dizaine díassociations, dont U Levante, du mouvement nationaliste "de gauche Manca Naziunale, de Corse sociale-démocrate, de Simon Renucci (gauche plurielle), et díI Verdi Corsi. Michelle Salotti, au nom du collectif, confie à la ministre de líEnvironnement et de líAménagement du territoire en visite en Corse, à Corte, son inquiétude à propos de la "nécessaire adaptation de la loi Littoral, relevant que "dans le dernier schéma díaménagement de la Corse préparé par la collectivité territoriale, la loi Littoral níy était pas appliquée. Selon la porte-parole, "le laxisme de líÉtat est hélas trop souvent indéniable" sur le DPM, 509 occupations sont répertoriées, soit 400 en Corse-du-Sud et 109 en Haute-Corse (Corse Matin, 26 septembre 1999). Cíest ce collectif qui a publié à cinquante mille exemplaires, à líéchelle régionale, une plaquette pédagogique très documentée sur la loi Littoral.
 
 

Au niveau national, le paradoxe Voynet

La ministre de líEnvironnement et de líAménagement du territoire se positionne clairement en Corse dans le camp des partisans díun pouvoir autonome dévolu aux élus de la collectivité territoriale. Au journal télévisé de France3 Corse, le 25 septembre, elle déclare "Je níai aucune gêne à parler díautonomie. Cíest un sujet traité de manière sérieuse par la plupart des gouvernements européens, et cíest un sujet que la France aborde elle-même dans bien des territoires.

Inversement, au niveau national, et allant ainsi à líencontre des revendications des mouvements nationalistes de Corsica Nazione, avec lesquels elle est politiquement alliée à líéchelle régionale et européenne, la ministre multiplie ses déclarations publiques en faveur díune application stricte de la loi Littoral en Corse elle dissocie, alors quíils sont concordants, le fait díaccorder un pouvoir díadaptation législative aux élus de líAssemblée de Corse et líapplication stricte de la loi nationale dans líîle. Dans une lettre adressée au Premier ministre, Dominique Voynet fait savoir le 22 novembre 2000 quíelle "ne pouvait accepter les propositions de dérogation à la loi Littoral évoquées dans líavant-projet de loi sur la Corse soumis le 24 novembre à Lionel Jospin (Le Monde, 24 novembre 2000) díoù un discours contradictoire, "une éventuelle autonomie ne devant pas síexercer au détriment de líenvironnement" (Le Monde, 23 mai 2000). Peut-on prôner líautonomie... excepté en matière díenvironnement

Le "pari du Premier ministre en Corse en matière díécologie est de vouloir prouver que le pouvoir régional est plus apte à satisfaire les exigences díune politique environnementale que le pouvoir national, et cela dans une île en crise économique, sociale, politique et civique. La majorité des élus territoriaux, dans líavis de líAssemblée de Corse sur líavant-projet de loi modifiant et complétant le statut de la collectivité territoriale, síest prononcée pour le principe díun large bloc de compétences cohérent pour líenvironnement. Est-ce que le pouvoir de la collectivité territoriale de Corse sera en mesure de maîtriser líaménagement de son potentiel environnemental sur le plan des exigences écologiques